Les grands principes.
Le régime paléolithique, fréquemment nommé régime paléo, est un régime alimentaire issu du mode de vie paléolithique. A la fois hype et controversé, il est fréquemment à la base de discussions animées sur les forums santé.
Il se compose d’aliments que les hommes vivant à l’époque du Paléolithique auraient pu consommer. On y retrouve une part importante de viandes maigres, d’œufs, de poisson à tous les repas. On consomme en plus des produits animaux, des fruits et légumes frais sans amidon, des fruits secs, des noix et des graines.
Il exclut, en revanche les produits issus de l’agriculture et de l’industrie agroalimentaire, comme les céréales, les légumineuses, les huiles végétales et les produits laitiers.
D’après les partisans de ce régime, l’industrie agro-alimentaire est la cause du développement de l’obésité, de maladies cardio-vasculaires et du diabète. Ils préconisent donc un retour à l’alimentation qui prévalait au Paléolithique.
Le livre « The Paleo Diet », rédigé par Loren Cordain, professeur au département de la santé et sciences de l’exercice à la Colorado State University est « la bible » pour les adeptes de cette approche. En Francophonie, l’ouvrage de référence est « L’alimentation ou la troisième médecine », signé par le docteur Jean Seignalet.
Que pense la science de ces hypothèses pleines de bon sens ?
Que dit la critique ?
Les promoteurs du régime paléo prétendent que nos ancêtres étaient des chasseurs-cueilleurs en mettant l’accent sur la chasse… Les études scientifiques ont démontré le contraire ! Ils basent leur hypothèse en grande partie sur une analyse des populations de chasseurs-cueilleurs contemporaines, analyse qui a n’a pas résisté à une critique scientifique rigoureuse [1].
Les primates, y compris les humains, ont pratiqué la chasse et la cueillette pendant des millions d’années. Il n’existe probablement aucune population de primates qui ait été végétalienne stricte. Néanmoins, les plantes ont représenté, à quelques exceptions près, la partie prépondérante de l’apport calorique pour presque tous les primates.
Interrogé sur l’idée commune que nos ancêtres étaient principalement des carnivores, le célébre anthropologue , Nathanial Dominy, Ph.D., du Dartmouth College répond [2], « c’est un mythe. Chasseurs-cueilleurs, la majorité de leurs calories proviennent de plantes comestibles… la disponibilité de viande est tout simplement trop imprévisible ».
L’analyse de la littérature scientifique transmet encore les conclusions suivantes :
- Un article publié dans la revue Nature signale que la quasi-totalité de l’alimentation de nos tous premiers ancêtres, datant d’il y a 2 millions d’années, était composée de feuilles, fruits, bois et écorces. Un régime comparable à celui des chimpanzés des temps modernes [3].
- Les travaux de recherche publiés en 2011 dans la revue Proceedings of the National Academy of Science montrent que même l’homme de Neandertal mangeait une variété d’aliments végétaux ; des grains d’amidon ont été trouvés sur les dents de squelette des régions chaudes de la Méditerranée orientale aux régions froides du nord-ouest de l’Europe. Il semble qu’ils aient même cuit et bien autrement préparé des aliments végétaux pour les rendre plus digestes, il y a 44 000 ans [4].
Il est donc bien établi que contrairement à ce qui est prétendu par son créateur, le régime paléo est différent du régime des hommes qui vivaient au Paleolithique. En est-il pour autant un mauvais régime ?
Efficace ou pas ?
A nouveau, seule la science peut nous donner une réponse fiable. Parmi la masse d’information disponible, on a tenté de faire simple. Voici un tableau résumé de plusieurs études sur les effets tantot positif, tantot négatif du régime paléo. Les auteurs envisagent son impact au niveau cardio-vasculaire, pondéral, inflammatoire, lipidique, glycémique et envisagent parfois un comparatif avec d’autres études.
Auteurs
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Nombre de sujet |
Résultats |
Lindeberg et al (2007)
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29 |
+ : Perte de poids comparable au régime méditéranéen, diminution du tour de taille. |
Osterdahl et al (2008)
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14 |
+ : Perte de poids, diminution du tour de taille, amélioration de la pression systolique
– : Carence en calcium |
Jönsson et al (2009)
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13 |
+ : améliore HbA1C*, améliore la tension artérielle, le poids et la mesure de la taille. |
Frassetto et al (2009)
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9 |
+ : améliore la tension artérielle, et la quantité de lipide dans le plasma |
Jönsson et al (2013)
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13 |
+ amène rapidement la satiété, sensation d’énergie
– : difficile à suivre |
Boers et al (2014)
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34 |
+ : diminution de la tension artérielle et du poids, amélioration du profil lipidique. |
Mellberg et al (2014)
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70 |
Comparaison avec le régime nordique : améliore la perte de poids à 6mois, mais identique à 2 ans. Les 2 régimes améliorent la pression sanguine et le profil lipidique. |
Bligh et al (2015)
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24 |
Comparaison avec les recommandations de l’organisation mondiale pour la santé : pas de différence significative dans les réponses au glucose et à l’insuline entre les 2 régimes. |
Tab. 1 : récapitulatif des articles étudiants les effets du régime paléo.
*HbA1C : indicateur de la glycémie.
Ces conclusions sur l’efficacité du régime paléo doivent être considérées avec une certaine prudence. L’efficacité du régime doit être tempérée par la faible puissance de ces études qui ne comportent qu’un monbre restreint de sujet, et qui sont réalisées à court terme.
Actuellement, la recherche scientifique ne soutient pas que ce régime est capable de traiter ou de prévenir l’autisme, la démence ou une quelconque pathologie mentale.
On observe cependant une tendance quasi générale sur l’amélioration du poids, de la pression sanguine et du profil lipidique.
En conclusion :
La diète est intéressante car elle souligne l’excès d’aliment transformé au sein de notre alimentation.
Il semble malgré tout apporter plusieurs bénéfices à l’organisme dans la gestion de dérangements organiques et la gestion du poids.
Mais le sujet reste insuffisament étudié pour affirmer avec certitude qu’il est responsable tout les bénéfices qu’on lui attribue.
Pour cette raison, Les chercheurs ne recommandent actuellement pas d’y adhérer en permanence, et surtout pas sans un apport complémentaire en calcium.
Comme dans bien des domaines, la modération semble maitresse du jeu !
Pour aller plus loin :
- Paleo nutrition – Julien Venesson
- Le modèle Paleo – Mark Sisson
Références :
[1] K. Milton, Hunter-gatherer diets—a different perspective. Am. J. Clin. Nutr., 2000;71:665-667.
[2] http://www.youtube.com/watch?v=h0PF5R0ywp4
[3] Amanda G. Henry, Peter S. Ungar, Benjamin H. Passey, Matt Sponheimer, Lloyd Rossouw, Marion Bamford, Paul Sandberg, Darryl J. de Ruiter, Lee Berger, The diet of Australopithecus sediba. Nature, 2012;487:90–93.
[4] A.G. Henry, A.S. Brooks, D.R.Piperno, Microfossils in calculus demonstrate consumption of plants and cooked foods in Neanderthal diets (Shanidar III, Iraq; Spy I and II, Belgium). Proc Natl Acad Sci U S A. 2011;108(2):486-91
[5] Lindeberg S, Jonsson T, Granfeldt Y, et al. A Palaeolithic diet improves glucose tolerance more than a Mediterranean-like diet in individuals with ischaemic heart disease. Diabetologia 2007;50:1795–807.
[6] Osterdahl M, Kocturk T, Koochek A, Wandell PE. Effects of a short-term intervention with a paleolithic diet in healthy volunteers. Eur J Clin Nutr 2008;62:682–85.
[7] Jönsson T, Granfeldt Y, Ahren B, et al. Beneficial effects of a Paleolithic diet on cardiovascular risk factors in type 2 diabetes: A randomized cross-over pilot study. Cardiovasc Diabetol 2009;8:35.
[8] Frassetto LA, Schloetter M, Mietus-Synder M, Morris RC Jr, Sebastian A. Metabolic and physiologic improvements from consuming a paleolithic, hunter-gatherer type diet. Eur J Clin Nutr 2009;63:947–55.
[9] Jönsson T, Granfeldt Y, Lindeberg S, Hallberg AC. Subjective satiety and other experiences of a Paleolithic diet compared to a diabetes diet in patients with type 2 diabetes. Nutr J 2013;12:105.
[10] Boers I, Muskiet FA, Berkelaar E, et al. Favourable effects of consuming a Palaeolithic-type diet on characteristics of the metabolic syndrome: A randomized controlled pilot-study. Lipids Health Dis 2014;13:160.
[11] Mellberg C, Sandberg S, Ryberg M, et al. Long-term effects of a Palaeolithic-type diet in obese postmenopausal women: A 2-year randomized trial. Eur J Clin Nutr 2014;68:350–57.
[12] Bligh HF, Godsland IF, Frost G, et al. Plant-rich mixed meals based on Palaeolithic diet principles have a dramatic impact on incretin, peptide YY and satiety response, but show little effect on glucose and insulin homeostasis: An acute-effects randomised study. Br J Nutr 2015;113:574–84.
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